La Bible du Coeur de Jésus

Edouard Glotin

Presses de la Renaissance


Notes et Annexes

Introduction

Annexes
Haurietis Aquas
Le Coeur de Jésus et le Shabbat juif
Benoît XVI : Lettre au R.P. Kolvenbach (50° anniv. d'HA)
Benoît XVI : Message de Carême 2007

Commentaires
des illustrations

Fig. 1 à 11
Fig. 12 à 19
Fig. 20 à 29
Fig. 30 à 39
Fig. 40 à 49
Fig. 50 à 59
Fig. 60 à 69
• Fig. 70 à 83

Notes
Prologue
Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 9
Chapitre 10
Chapitre 11
Chapitre 12

Liste des sigles
Figures 70 à 83

Figure 70 (p. 457) : Jehovah devient notre père (Cornélius)

Né dans une famille protestante, Jean-Georges Cornélius (1880-1968), ami de Bernanos, reçut en 1931 le baptême catholique. Lié aux bénédictins de Maredsous et Solesmes, avec une carmélite du nom de Sylviane, comme confidente et modèle, Cornélius fut habité par une idée originale que seule la symbolique permet de développer sans verser dans l’outrance : le Tout-Puissant – celui qu’à une époque on nommait Jéhovah – était comme lui, Jean-Georges Cornélius, un converti – converti par l’amour héroïque de son Fils à une paternité solidaire de tous les souffrants de la terre. Et cela pour toujours, comme l’exprime la lanière rouge qui lie les deux bras gauches : « Petite sœur, écrivait-il, il faut avoir pitié de Dieu le Père qui, depuis des millénaires, regarde un grand ange nu, qui semble en cristal, mais qui en vérité est fait de toutes les larmes du monde, larmes d’enfants, larmes d’innocents, larmes de ceux qui meurent tout seuls et enfin… les nôtres. Et là enfin il se repose en vous. »



Figure 71 (p. 472) : Comparaison de deux manuscrits

Sur le message dont Marguerite-Marie fut chargée pour Louis XIV, voir p. 470-474 et 478-479. Les deux phrases du message lui-même sont retranscrites p. 478.
Restitué en ces termes, il est compréhensible que des historiens modernes se soient hasardés à nier l’authenticité d’un message dont nous ne possédons pas l’autographe. Cependant, au terme d’un longue discussion, Montm 187-194, Jacques Benoist conclut à une « probabilité d’authenticité ».
Si on veut résumer ce qui ressort de la comparaison des manuscrits, dus sans doute pour la plupart à d’anciennes novices de la sainte – dont la sœur de Farges -, le message apparaît dans toutes les versions sauf dans celle du dossier de canonisation et dans le ms. 6, généralement considéré comme le plus fiable.
A la différence de Benoist, j’ai eu entre les mains les manuscrits eux-mêmes, j’ai pu les examiner longuement et me constituer un dossier de photocopies. Si j’ai tenu à mettre en regard le texte de deux d’entre eux, c’est pour montrer que, dans le bas, celui de droite contient le début du long texte sauté, tandis que celui de gauche – le fameux ms. 6 – comporte à cet emplacement, signalé dans le haut par un filet rouge, un étrange blanc. Or les lettres de la sainte étaient recopiées sans passages à la ligne.
Si le ms.6 était destiné à circuler en dehors du monastère, on s’explique très bien, surtout si le monarque était encore régnant, qu’il soit apparu malséant et imprudent de faire allusion à ce message auquel Louis XIV n’avait pas donné suite.



Figure 72 (p. 483) : Christ-Roi (Cornélius)

Le Musée Eucharistique du Hiéron de Paray-le-Monial est fondé sur l’idée d’une restauration de la Royauté sociale du Christ dans un contexte politique alors difficile, qui se cristallise autour de la défaite française de 1871. Cornélius est pourtant à l’opposé d’une vision triomphaliste comme celle qui transparaît au fronton du bâtiment destiné à abriter la collection d’art sacré rassemblée à grands frais par le baron Alexis de Sarachaga : Au Christ Roi. « J’ai un Christ Roi, qui peut vous intéresser, écrit-il à sœur Sylviane. Il a dit : ‘Mon Royaume n’est pas de ce monde’, alors j’ai pensé à lui, errant dans un monde très sombre et promenant sa majesté dans l’orage et les demi ténèbres où nous vivons, nous autres chrétiens lâchés en liberté. Il m’a semblé que ce Roi errant était fait pour régner sur tous les errants que nous sommes. Je sais qu’un pur théologien trouverait que je m’abuse, mais moi je pense toujours au Christ et jamais aux théologiens. »
Le peintre a fait don au Musée d’art sacré des deux huiles que nous reproduisons. Nous sommes reconnaissants au musée d’avoir gracieusement autorisé les Dagli Orti à les photographier.



Figure 73 (p. 487) : Pentecôte du 10e siècle

Ce type de représentation est caractéristique d’une brève période, celle du 10e siècle. Il présente l’intérêt de mettre fortement en relief la source trinitaire de l’effusion. Tout en haut, dans une « gloire » en forme de cercle doré, une main, vraisemblablement celle du Père source de l’Esprit de Feu, puisque Jésus avait dit aux Onze : Je prierai le Père et il vous enverra un autre Paraclet. Aussi, sous le symbole évangélique de la colombe, l’Esprit est-il figuré dans une mandorle dorée immédiatement en dessous de cette main qui, de ce fait, prend la signification d’un geste d’envoi. Mais le plus remarquable de l’enluminure, ce sont évidemment les onze flammes de feu vermillon que crache le bec de la colombe, toute entière orientées vers le bas.
La disposition des Apôtres sur un arc en demi cercle semble inspirée des byzantins. Parmi les visages – où l’alternance imberbes et barbus est systématique -, on distingue au centre Pierre, identifiable grâce à l’attribut des clefs : il est imberbe et tonsuré, comme un Père Abbé occidental. Imberbe lui aussi Jean qui figure à sa droite, tenant de la main son évangile. Au centre droit, le seul personnage à porter une longue barbe noire : saint Matthieu, certainement puisqu’il tient lui aussi un évangile. On notera l’absence de Marie, la mère de Jésus, qui pourtant avait attendu avec les Onze la venue de l’Esprit.
Tout en haut de la composition, les deux bâtiments ne peuvent figurer que l’Eglise. Il semble que les deux rideaux – rose et vert – qui s’enroulent autour des colonnes extérieures soient une allusion au violent coup de vent qui annonçait l’arrivée du Feu.



Figure 74 (p. 550) : Marie au sein de la Trinité (Bradi Barth)

La réputation de Bradi Barth n’est plus à faire. Retirée en Belgique dans ses vieux jours, cette artiste suisse nous a laissé une œuvre religieuse, de style varié mais parfaitement reconnaissable, où les personnages se caractérisent par une grande pureté, reflet de l’âme de Bradi.
Comparé à ses autres productions, ce couronnement de Marie est d’une grande économie de couleur, puisque, pour marquer le caractère céleste de son sujet, l’artiste n’utilise que le blanc et l’or. Comme chez Roublev, les trois personnes de la Trinité s’inscrivent dans un cercle, signe de perfection, qui suggère leur tri-unité. Dieu n’en est pas pour autant replié sur lui-même, puisque de ce cercle doré émane un intense rayonnement ad extra.
Quoi qu’il en soit de l’inspiration russe, le thème est traité en style résolument occidental : les personnages sont barbus et portent une haute couronne d’or. Celle que le Père s’apprête à placer sur la tête de Marie est toute différente, d’une blancheur qui se réfère sans doute à son Immaculée Conception. Comme chez Roublev, les Trois sont strictement identiques. En revanche, ils correspondent chacun à une Personne divine, nettement identifiable grâce aux motifs qui ornent discrètement le fermoir de leurs manteaux : un globe pour le Père, une croix pour le Fils, un cœur pour l’Esprit.
La Mère de Dieu paraît une jeune fille, presque une toute petite fille. Sous les regards et les mains des Trois qui convergent vers elle, cette « toute petite chose » apparaît vraiment comme étant pour l’éternité, selon le mot de Jean Eudes, Totius media Trinitatis, le centre de toute la Trinité. Lorsque nous participerons nous-même à l’éternité bienheureuse, nous comprendrons comment cette immersion de Marie au sein de la Trinité a été la source de toute cette puissance de grâce qui la rend à la fois favorable au pécheur et terrible au démon.



Figure 75 (p. 600) : Fresque rupestre de Cappadoce

Datée du 11e siècle et malheureusement très abîmée, cette fresque rupestre de El Nazar Kilise, où dominent les rouges, comporte dans le haut les symboles cosmiques du soleil et de la lune. A droite et à gauche de la croix, deux personnages entièrement en rouge vermillon semblent assis : à droite, celui qui perce le côté, à gauche probablement celui qui lui tend l’éponge vinaigrée. Le premier personnage enturbanné est sans doute saint Jean ; portant une auréole, il est en effet debout et le geste de porter la main au visage est un geste de douleur. Par contre, je n’ai pu identifier le personnage en turban, auréolé lui aussi : richement vêtu, il désigne de la main droite le crucifié.
A gauche trois femmes auréolées. La première est évidemment Marie : elle est représentée en la forme de l’Hodigitria, c’est-à-dire celle qui montre le Christ.



Figure 76 (p. 603) : La madone des palefreniers (Caravage)

Le verset de la Genèse qu’il est convenu d’appeler le Protévangile (Gn 3, 15) annonçait à propos d’Eve que sa « descendance » écraserait la tête du serpent. Mais de quelle descendance s’agissait-il ? De Jésus ou de Marie, telle que la verra Catherine Labouré dans l’apparition de la rue du Bac, peu de temps avant la définition de l’Immaculée Conception ?

Le Caravage n’avait pas choisi entre les deux : c’est bien le pied de la Femme qui écrase la tête du serpent, puisqu’aussi bien Dieu avait dit au Serpent : Je mettrai une hostilité entre toi et la Femme. Mais c’est sous la pression du petit pied de son Fils mâle. Ainsi devient-il clair que Marie ne tire sa puissance co-rédemptrice que de la maternité divine qu’elle exerce, comme première des rachetées, en totale dépendance de son divin fils.



Figure 77 (p. 609) : Le Crucifié aux yeux clos

Jusqu’à il y a seulement quelques années, c’est seulement, pensait-on, à la période post-iconoclaste, sur l’onde émotive de la compassion qui au début du second millénaire souleva toute la chrétienté, que les artistes se seraient mis à représenter le Christ sur la croix non plus « sous un mode contraire à la nature », mais « selon la forme humaine naturelle », comme disait expressivement le patriarche de Constantinople Michel Cérulaire (11e siècle) non plus par conséquent triomphant vivant, debout, revêtu du colobium (tunique à courtes manches), mais nu et mort, avec le corps arqué pour indiquer le spasme de la souffrance. « Il était sans beauté (cf. Is 53, 2) celui qui fut suspendu au bois parce qu’alors qu’il était Dieu, la nature humaine souffrit » (inscription de la staurothèque de Limburg, 10e siècle).
Pour évaluer la portée de ce changement, il est utile de rappeler que l’Eglise de Rome commença par le refuser : à la moitié du 11e siècle, les légats pontificaux le reprochèrent à l’Eglise grecque (1). Mais les grands mystiques occidentaux du Haut Moyen Age, avec leur sensibilité pour les souffrances du Sauveur et de sa Mère, auraient bientôt ouvert la voie à la nouvelle iconographie provenant de l’Orient et issue elle aussi d’une ambiance monastique contemplative.
Pourtant, les études conduites par Weizmann sur les icônes conservées au monastère Ste-Catherine autorisent à anticiper de plusieurs siècles l’apparition du nouveau module iconographique de la Crucifixion, dans lequel le Christ est représenté mort, avec les yeux fermés.
Crucifixion, icône, monastère Ste-Catherine, Sinaï, 8e siècle, origine palestinienne (2).
C’est le plus ancien exemple où le Christ crucifié apparaît les yeux fermés, son visage est souffrant (toutes les lignes descendent) ; trois petites croix d’or dans les cheveux font certainement allusion à la couronne d’épines ; le sang sort de toutes les blessures, tandis que le double jet de sang et d’eau de la plaie du côté tombe sur la montagne représentée à gauche (3).
Ce jaillissement simultané d’eau et de sang avait été aussitôt identifié par l’Eglise comme un signe de résurrection. On en trouve une très belle attestation dans l’expression extrêmement dense et profonde du grand Origène : le nouvel Adam endormi sur la croix « ne fut pas comme les autres morts, mais du plus profond de la mort il manifesta des signes de vie dans l’eau et le sang et il fut, pour ainsi dire, un mort nouveau » (4).
La Vierge lève la main gauche vers son visage en signe de douleur, tandis que Jean sans le livre lève les yeux vers le Christ.
L’inscription au-dessus de la croix dit : le Roi des Juifs, tandis que l’indication Sainte Marie, pour la Vierge, est typique de la période pré-iconoclaste.
Les éléments réalistes (les yeux fermés, l’expression de la douleur) continuent donc à se fondre avec les éléments symboliques et la scène reste une méditation sur le mystère de la Croix. Ainsi s’explique que pendant des siècles continuent à coexister les deux représentations : Christ aux yeux ouverts ou aux yeux fermés, le message de fond ne change pas.



Figure 78 (p. 620) : Le Sacré-Cœur d’Odilon Redon

Le point de vue de l'historienne de l'art
Né et élevé à Bordeaux, Odilon Redon (1840-1916) fut un grand représentant du mouvement symboliste en peinture. Ce mouvement né avec la fin du siècle en réaction au Naturalisme, avait été préparé par la phase de découragement et de désespoir qui avait suivi la défaite de 1871 puis enrichi par des personnalités diverses : Puvis de Chavannes, Gustave Moreau…
Débarrassée de tout intellectualisme (parfois envahissant chez les autres artistes symbolistes) l’œuvre singulière d’Odilon Redon est l’expression, selon René Huygue, de « la part obscure et inconsciente de notre âme ».
Le Sacré Cœur, peint en 1906, appartient à la dernière phase de l’œuvre du peintre, celle où il utilise la couleur à profusion, se servant du pastel avec une extrême habileté et une grande originalité.
Incompris, à quelques exceptions près, par ses contemporains entravés par leur cartésianisme, Redon était très en avance sur son temps. Son œuvre annonce à la fois le surréalisme par son exploration de l’inconscient et l’abstraction par la grande liberté de la forme et de la couleur.

Le point de vue du théologien
Conservé au musée d'Orsay, Le Sacré-Cœur d’Odilon Redon offre un bon exemple de ce que la peinture des deux derniers siècles a produit de meilleur pour renouveler le thème. Le regard de celui qui contemple ce Christ va de son visage au cœur et du cœur au visage. Pour l’homme moderne, les yeux fermés de Jésus et toute l’expression de son visage lui permettent de réaliser ce qui avait été le rêve de l’homme médiéval : pénétrer dans le « cœur » de l’Agneau à travers la plaie de son « côté », - symbolisme qui nous reste assez hermétique aujourd’hui. Mais la tâche dorée qui lui tient lieu de cœur a quelque chose de fascinant. Si l’on considère les stries noires qui semblent vouloir étouffer le rayonnement de ce cœur, on pense au mot de saint Jean : Les ténèbres n’ont pu l’étouffer. Mais il est clair que ce rayonnement émane du plus profond du Cœur de Jésus, du « lieu » de son dialogue avec son Père.



Figure 79 (p. 667) : Trinité type Gnadenstuhl

Pour la troisième fois, nous rencontrons ce type trinitaire du Gnadenstuhl. Celui-ci est l’œuvre d’un anonyme, commandée vers 1400 par Hilleprand von Jaufenberg (il n’est pas facile d’identifier les deux saints dont le commanditaire a voulu être accompagné pour présenter sa prière au Père).
Vu que la colombe semble, par son attitude, encourager le Christ sur la croix, nous avons choisi cette version pour illustrer la légende de la Fig. 79, qui est textuellement une phrase extraite de la Somme théologique de saint Thomas



Figure 80 (p. 676) : Le Christ au sourire (Lérins)

Il existe à notre connaissance au moins deux exemples de ce Christ paradoxal : celui de Lérins et celui de Javier, le château de saint François-Xavier.



Figure 81 (pp. 680-681) : Lettre de Marguerite-Marie à Croiset

Cet extrait de lettre de Marguerite-Marie m’a paru si important que j’ai tenu à ce qu’il soit reproduit lisiblement sur une double page.



Figure 82 (p. 683) : Conchita

Parmi toutes les photos que nous possédons de Concepcion Cabrera de Armida, celle-ci m’a semblé la plus propre à traduire le charme de sa personnalité.



Figure 83 (p. 685) : La croix intérieure du Cœur de Jésus

Ce tableau, probablement exécuté sur les indications expresses de la Servante de Dieu, est à déchiffrer à partir des deux croix qui y figurent : la grande croix, celle du corps de Jésus, et la petite, celle de son cœur. Or, si étonnant que cela puisse paraître, Jésus a affirmé à Concepcion et à bien d’autres mystiques avant elle que la croix de son « cœur », qui avait duré depuis le premier instant de son incarnation, avait été infiniment plus douloureuse que la pourtant si effroyable Passion que son corps avait endurée sur la croix.



NOTES :

(1) : Cf. G. Millet, Recherches sur l’iconographie de l’Evangile aux XIVe, XVe et XVIe siècles, éd. Boccard, Paris, 1960, p.400.

(2) : Cf. K. Weitzmann, The monastery Saint Catherine at Mount Sinai – The icons – Volume one : from the sixth to the tenth century, Princeton University Press, Princeton 1979, p. 61ss ; catalogue n. B 36.

(3) : C’est le premier exemple de représentation distincte du flux d’eau et de sang. On le retrouve à Hosios Lukas.

(4) : Contra Celsum, II, 69 ; PG 11, 904.



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